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"GHER D'MAR YOSSEP" OU LE SACRIFICE

Au lendemain de la proclamation de la République Turque au début de notre siècle, son gouvernement décida de récolter des taxes trimestrielles auprès du peuple pour augmenter son budget et financer les charges de l'État. Ces taxes étaient payées d'une manière collective. En effet, le gouvernement exigeait une somme fixe de l'ensemble de la population de chaque village, et c'était aux villageois de répartir cet argent sur les familles présentes dans le village. Chaque famille cotisait en fonction de ses revenus, de ses charges familiales et de sa situation sociale. Ne bénéficiant d'aucune subvention, les villageois étaient ruinés et voyaient leur budget, déjà faible, diminuer chaque jour en raison de ces taxes permanentes. De plus, ces dernières ont provoqué une grande famine dans le village, ce qui a incité les intellectuels et les dirigeants du village à réfléchir à leur sort et à la manière de réorganiser le mode de vie des habitants.

À l'époque, l'église d'Ischy possédait un grand nombre de propriétés et de biens. Ses richesses provenaient essentiellement des dons et des sacrifices des personnes qui croyaient au pouvoir et aux capacités de Saint Joseph Hazzaya. Le conseil du village s'est réuni et a décidé de la participation de l'église au paiement de cette taxe, proportionnellement aux fonds et aux propriétés de l'église. Cette décision a provoqué une énorme polémique au sein de la population et a entraîné une série de morts parmi l'élite du village. En effet, en janvier 1933, le maire du village, Hanno Yonan, a contracté le virus de la maladie appelée "Alàm dàtirriya" par la population, et il est tombé malade le jour du mariage de son fils Poles, le 6 janvier 1933. Il resta alors alité pendant une semaine et mourut. Ensuite, plusieurs autres personnes ont subi le même sort. Ces personnes étaient parmi les représentants de la population auprès des instances et des autorités administratives. Le nombre de victimes était de douze adultes et probablement quelques enfants et adolescents. Givergis Hanna Markos Sana mourut le même jour que le maire. Ce fut ensuite le tour de Musel Sapanis quelques jours plus tard, suivi par Pitros Yossep Gulan et Awro Gawso. Le virus ne s'arrêta bien entendu pas là et contamina une partie des habitants. Ghawso Migo, victime d'un malaise gastrique, mourut. La malédiction frappa également Iskandar Migo, qui succomba à son tour. Le malheur s'abattit sur la maison de Miryam Manser, la femme de Ghawso Migo, qui mourut tragiquement.

Traumatisés par cette tragédie et par le grand nombre de victimes, la population, et particulièrement le conseil du village, cherchaient l'origine de cette malédiction qui avait brutalement frappé l'ensemble des habitants. La terreur s'était installée dans les cœurs car tous étaient conscients du danger de la maladie et s'attendaient à être contaminés par ce violent virus.

Après ce choc, certains sages du village pensèrent que cette malédiction était une punition de Saint Joseph. Alors, ils ont commencé à prier et à demander grâce à ce dernier. Ils décidèrent d'accomplir une action supplémentaire pour apaiser leur protecteur. Cette dernière fut organisée sous la forme d'un sacrifice collectif auquel toute la population participerait pour apaiser la colère du Saint. De plus, Pitros Hanno aurait rêvé d'un homme vêtu de blanc et portant une barbe blanche. Il affirmait que cet homme l'avait sérieusement menacé d'aggraver la punition commencée quelques mois auparavant si les dirigeants ne décidaient pas d'annuler les taxes imposées sur les biens de l'église. Il racontait que l'homme en question était très en colère et qu'il comptait anéantir la population du village si une décision n'était pas prise rapidement. Cela motiva l'ensemble du village, en particulier la classe dirigeante, à prendre une décision sans tarder.

Les sages du village se convinrent que Saint Joseph était à l'origine de ce malheur. Dans le désespoir le plus complet, et pour tenter de mettre un terme à cette épidémie, ils organisèrent un sacrifice collectif dans la cour de l'église, appelé "Gher d'Mar Yossep". Les préparatifs furent menés de manière rapide et efficace pour obtenir l'effet escompté.

Chaque famille apporta son soutien à cette action et y participa pleinement. En effet, les familles offrirent une tête de bétail ou, pour les familles dépourvues de bétail, un volume de pains. Les villageois étaient convaincus qu'une attente serait fatale à l'ensemble de la population, c'est pourquoi, la première année, la célébration eut lieu en hiver. La préparation fut très rapide malgré les conditions climatiques défavorables. Les années suivantes, ce sacrifice fut effectué en automne, pour que cette action de grâce se déroule dans de meilleures conditions. Dès que le sacrifice eut lieu, l'épidémie cessa.

Le dimanche matin, tout le village était invité à la messe, célébrée à la mémoire de l'honorable Mar Yossep. Après la messe, le pain et les bêtes étaient rassemblés dans la cour de l'église. Les bêtes étaient égorgées en présence des chefs du village. La voûte de la porte de l'église était tachée de sang, comme dans les temps bibliques ; ce geste symbolisait la protection contre le Mal. Une petite partie de la viande était utilisée pour le repas communautaire. Les sages, les dirigeants, les diacres et le curé étaient conviés à ce repas, qui symbolisait l'union avec l'église et la solidarité au sein du village. L'autre partie de la viande était répartie en parts égales. Chaque famille recevait une part, et les personnes de passage dans le village y avaient également droit.

En général, le Gher se faisait pendant la première semaine de septembre car c'était le retour de la population au village après trois mois passés dans les montagnes. De plus, les chevreaux étaient meilleurs en septembre. Il n'y avait pas de jour précis pour célébrer cet événement. Le conseil du village se réunissait et se mettait d'accord sur le jour qui convenait le mieux aux habitants.

En France, les "Ischayyé" continuent leur action de grâce, car ils sont toujours convaincus que Saint Joseph Hazzaya les a aidés tout au long de leur vie, notamment pendant leur émigration et leur installation en France. Lorsqu'une famille prenait le chemin de l'exil, elle se remettait entre les mains de Saint Joseph Hazzaya et le priait pour qu'il la guide sur le droit chemin. Les anciens habitants d'Ischy sont convaincus qu'ils ont été protégés par Saint Joseph Hazzaya lorsqu'ils habitaient à Ischy, pendant leur voyage et encore aujourd'hui. C'est pourquoi ils veulent continuer à le vénérer et à le prier. Ils ont décidé de préserver le sens de ce sacrifice, mais la manière de l'organiser a logiquement été modifiée en raison de leur arrivée en France, un milieu différent de celui dans lequel ils avaient vécu.

De plus, les organisateurs ont décidé de célébrer "Gher" avec "Schéra" pour faciliter l'organisation et suivre l'évolution de la société moderne. Cela explique en grande partie la divergence des opinions parmi les anciens habitants d'Ischy. En effet, la pression de l'opinion des villageois oblige les organisateurs à faire les bons choix pour satisfaire la majorité. C'est pourquoi il est très difficile de conserver le sacrifice sans y apporter des modifications de forme, mais le fond reste intact, ainsi que son principe. En France, nous en sommes à la quatrième session de cette action de grâce. Chaque année a apporté une nouveauté dans la manière de faire et de pratiquer. Nous pensons que nous sommes sur la voie d'une évolution favorable en termes de partage, d'entente, de solidarité et de sacrifice.


Prière à Staint Joseph le Voyant


C'est une prière adressée à Saint Joseph le Voyant, en reconnaissance de sa sainteté et pour le remercier de nous porter secours.
Cette prière est ècrite en sureth